Robotnicka / Divide+Conquer Split LP (2001)

DATA

01. Poste-Avancé

Je voudrais ne penser à rien. Finis les mots, abominations hurlées par la télévision. Un écran de couleur pour unique miroir cartographie la face de la réalité.

02. Purifications

Ne cesserez-vous donc ces massacres cruels et cette folie qui vous pousse à vous entre-tuer. La foule hésite à sacrifier le supplicié mais l'homme sourd à ses cris emporte l'égorgé. Que le jour de ma mort me détruise avant de laisser mes lèvres accomplir le crime de nourriture. (Empédocle)

03. Du Renoncement

Laisse tomber la pluie sur la forêt et déplorer la férocité des saisons [invoquer l'avant, l'antan, l'âge d'or et se passer d'explication ?] Tombe tombe tombe la pluie. Lave les crimes des réducteurs de terre, l'heure de la délivrance va sonner. Les pionniers du bonheur sont en plein travail.

04. De la Femme

La tête ensorcelée, ses courbes sont familières, joli corps emballé pour le compte de Marie Claire. L'image révèle la beauté secrète de la féminité que j'ai assez de voir calculée, mesurée, prête à porter. Sois femme ! Achète tout ce que tu dois être, achète pour être satisfaite. Sois femme ! Sois Fière de te croiser dans les rues. Fixée du regard, j'attends... L'affiche se décollera-t-elle ? Mais la fille au poster sourit. Qui la possèdera ?

05. Post-Scriptum

Ecartez-vous de moi, qui patiente sans bouche; A vos pieds je suis né, mais vous m'avez perdu; Mes feux ont trop précisé leur royaume; Mon trésor a coulé contre votre billot. Le désert comme asile Au seul tison suave Jamais ne m'a nommé, Jamais ne m'a rendu. Ecartez-vous de moi qui patiente sans bouche; Le trèfle de la passion est le fer dans ma main. Dans la stupeur de l'air où s'ouvrent mes allées, Le temps émondera peu à peu mon visage, Comme un cheval sans fin dans un labour aigri. (René Char)

06. L'Espoir 2

Appuyée contre un arbre, je sais. Je peux respirer. Le soleil peut bien insister. Je sais m'endormir en paix. Appuyée contre un arbre, je sais, je peux me faufiler, prévoir les attaques, je sais déboulonner discrètement. They're paving all the way... Appuyée contre un arbre, je sais. Je peux entendre gronder le monde autoroute-supermarché. Je sais mettre fin au vacarme ou assister en silence à l'effondrement.

07. De L'Empire

Assassins, les corps tombent. La paix monétaire éteint deux millénaires. Multilatéral, AMI, empire global/multinational, un monde sans bien ni mal. La terre brûlée, ravagée, les récoltes seront exportées. Plus rien à perdre, rien à gagner. La Banque veille sur le monde cette année.

08. L'Espoir 1

Trop tard, il est trop tard pour détourner les yeux, balancer la tête, regarder les vieilles images et penser que tout ira malgré tout.

09. Zoomachie

Elle ne pas parle pas, elle ne pense pas, elle se laisse aller, poussée, habituée. Son instinct articule une existence déterminée. Alors pourquoi hésiter ? Tu verras comme elle sera contente d'être au chaud dans ton ventre. Avalée, tu ne penseras même plus à la bête.

10. Des Femmes

Avec un prénom pour support, pour supporter le tord, le sort que l'on m'a jeté. Je réponds par le nom de mon père ou par celui du père de ma mère. Je suis une femme sans nom avec pour tout héritage une histoire mise en bas de page. On a entamé la substitution. Je suis une femme sans nom. Mais par qui sommes nous passées ? Par quel homme, quel propriétaire avons-nous transité avons-nous été échangées ? De mon passé j'ai perdu la trace. Je suis une femme sans nom.